Conakry accueille la 3ᵉ Conférence internationale du Jeune Avocat : “La FAUJA, 15 ans après, entre regards croisés et perspectives”

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root Judicalex Guinée 25/10/2025

Après Bujumbura et Kigali, la capitale guinéenne abrite, du 23 au 26 octobre 2025, la 3ᵉ Conférence internationale du Jeune Avocat autour du thème « La FAUJA, 15 ans après : Entre regards croisés et perspectives ». L’événement est organisé par la Fédération Africaine des Associations et Unions de Jeunes Avocats (FAUJA), en partenariat avec l’Association des Jeunes Avocats de Guinée (AJAG). Cette rencontre d’envergure réunit des représentants de plusieurs pays africains autour de panels portant sur des thématiques d’actualité : l’intelligence artificielle et le jeune avocat africain, la digitalisation des cabinets d’avocats, le contentieux foncier et l’investissement immobilier, ou encore la garde à vue et l’instruction.
La cérémonie d’ouverture a été présidée par Mme Rose Pola Pricemou, ministre des Postes, Télécommunications et de l’Économie numérique, marraine de l’événement, en présence du chef de cabinet du ministère de la Justice, représentant le ministre, ainsi que d’anciens ministres, bâtonniers et invités de marque.
Dans son allocution, Maître El Hadj Madiou Barry, président de l’Association des Jeunes Avocats de Guinée, a rappelé la genèse de la FAUJA
« Les associations des jeunes avocats d’Afrique ont décidé, il y a 15 ans, de créer une faîtière regroupant l’ensemble des unions nationales. C’est ainsi qu’est née la Fédération africaine des associations et unions des jeunes avocats. Après Bujumbura, première conférence, puis Kigali en 2011, nous voici à Conakry pour la troisième édition. »
Le président de l’AJAG a salué la forte mobilisation des bâtonniers africains, soulignant la présence de représentants du Togo, du Rwanda, du Niger et de la Guinée :
« Pour la première fois, nous avons accueilli autant de bâtonniers en exercice. C’est une première également pour la Guinée, où tout le Barreau s’est mobilisé. Nous avons reçu le soutien du gouvernement, du Premier ministre et de plusieurs ministres pour permettre la tenue de cette conférence. »
Il a également mis en avant la pertinence du thème choisi
« Nous célébrons 15 ans d’existence. Il fallait dresser un bilan, tirer les leçons du passé et corriger les imperfections pour mieux s’affirmer sur la scène internationale. »
Parlant des thématiques abordées, il a insisté sur l’importance de l’intelligence artificielle et de la digitalisation
« Pour la rencontre, nous avons choisi des thèmes spécifiques et d’actualité : L’intelligence artificielle et le droit. La digitalisation des cabinets d’avocats. Aujourd’hui, quand on parle de la digitalisation, de l’intelligence artificielle, tous les métiers du monde sont bouleversés par cette technologie. Le droit aussi, le métier d’avocat aussi. Donc ce que nous attendons, c’est que les jeunes avocats s’approprient de ces outils. Qu’ils s’approprient de ces outils et que nos cabinets, ce qui va certainement alléger notre travail, apportent nos recherches. Parce qu’au lieu de passer beaucoup de temps à faire nos recherches physiques, bibliographiques, bibliothécaires, on peut facilement se retrouver avec l’IA, l’intelligence artificielle. »

Maître Barry a aussi évoqué les litiges fonciers, un sujet majeur dans les juridictions africaines, expliquant que le panel réunit « notaires, magistrats, avocats et huissiers » pour réfléchir à de meilleures pratiques.
Pour Maître Mamadou Souaré Diop, bâtonnier de l’Ordre des avocats de Guinée, le rôle du jeune avocat est central dans la continuité et la modernisation du Barreau
« Le jeune avocat n’est pas seulement l’avenir du Barreau, il est le souffle, l’énergie et la conscience en éveil. Comme l’écrivait Montaigne, les enfants ne sont pas des vases que l’on remplit, mais des feux que l’on allume. »
Dans un ton empreint d’humanisme, il a exhorté les anciens à soutenir leurs cadets
« Soutenir le jeune Barreau, c’est investir dans la continuité de notre serment. À nous, anciens, de le guider sans l’étouffer, de le soutenir sans le freiner. »
Et de conclure avec une note philosophique
« Nous n’héritons pas du Barreau de nos aînés, nous l’empruntons à nos jeunes confrères. Que ces journées renforcent la fraternité et la conscience du devoir, afin que l’avocat demeure, en Afrique comme ailleurs, le gardien des libertés et la voix de ceux qui n’en ont plus. »
Dans son intervention, Mme Rose Pola Pricemou, ministre des Postes, Télécommunications et de l’Économie numérique, a salué l’importance du rôle des avocats dans une ère de transition numérique
« Nous vivons une époque où le numérique redéfinit les frontières de nos sociétés, bouleverse les institutions et transforme la justice. Le jeune avocat africain doit être à la fois le gardien du droit et l’acteur d’un futur numérique responsable. »
Elle a rappelé la vision du gouvernement guinéen sous le leadership du président Mamadi Doumbouya et du Premier ministre Amadou Oury Bah
« Le numérique et la justice sont deux leviers essentiels de la refondation nationale, inscrits dans la vision Simandou 2040, qui place la technologie au service de la justice sociale et du progrès humain.»
Tout en saluant la transformation numérique de la justice, le casier judiciaire numérisé, audiences à distance, la ministre a mis en garde contre les risques
« A travers cette vision, la Guinée affirme son engagement à bâtir un État moderne, inclusif et respectueux des droits fondamentaux. Où le numérique devient un outil de transparence, d’accès à la justice et d’efficacité administrative. Mais cette transformation n’est pas sans défis. La digitalisation ouvre de nouvelles perspectives, certes, e-justice, casier judiciaire numérisé, audience à distance, mais elle soulève aussi des enjeux majeurs, cyber sécurité, protection des données personnelles, responsabilité juridique liée à l’intelligence artificielle. Ces enjeux appellent à une réflexion collective sur la manière d’intégrer l’innovation tout en préservant les valeurs fondamentales de la justice, qui sont l’éthique, la probité et la défense des droits humains. Dans cette dynamique, les avocats et les juristes africains que vous représentez ici, sont les plus importants. Ils ont aussi un rôle déterminant à jouer. Ils doivent contribuer à encadrer le progrès technologique, à anticiper les dérives et à défendre une approche humaine du numérique.»
S’adressant aux jeunes avocats, elle a lancé un appel vibrant
« Votre génération porte la responsabilité de faire évoluer le droit sans le dénaturer. Vous êtes les bâtisseurs d’une justice moderne, connectée et accessible à tous. Le gouvernement guinéen continuera d’accompagner les initiatives qui valorisent la jeunesse et promeuvent une Afrique du droit et du numérique forte et souveraine. »
Cette 3ᵉ Conférence internationale du Jeune Avocat marque un tournant symbolique dans l’histoire de la FAUJA. Quinze ans après sa création, la Fédération se dote d’une vision renouvelée : celle d’un jeune avocat africain ancré dans la tradition du droit mais ouvert à l’innovation numérique.
Entre réflexions stratégiques, échanges intergénérationnels et ambitions continentales, Conakry aura été le théâtre d’un message fort : l’avenir du droit africain se construira avec sa jeunesse, dans un équilibre entre rigueur, éthique et technologie.

 Par Rama Fils

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